Je Veux Savoir, fin d’une belle aventure

2015-06-15-jeveuxsavoir

Historique

En 2013, nous avons eu la chance d’obtenir le soutien financier du Ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Participation citoyenne, Bernard Drainville, pour développer un portail de demande d’accès aux documents, nommé par la suite Je Veux Savoir.

La plateforme fut lancée sous forme d’un pilote de 6 mois à l’automne 2013. Durant cette période, la plateforme permettait de soumettre des demandes d’accès à l’information auprès de 5 ministères participant à la démarche. Le but était double: roder la plateforme utilisée (Alaveteli) et travailler avec les ministères concernés à l’intégration de ce type d’outil. L’ensemble de la démarche s’inspirait de What Do They Know, une initiative très fructueuse conduite par l’organisme mySociety au Royaume-Uni.

Toute demande réalisée par l’interface web de Je Veux Savoir se traduisait par une demande par courriel envoyée au ministère concerné. Autant la demande initiale que les échanges subséquents (incluant, éventuellement, la réponse finale) devenaient publics sur la plateforme.

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Ceci n’était pas sans défi pour les organismes publics concernés. Bien que tous disposent d’une adresse courriel et que la loi permette en théorie les demandes par courriel, les ministères n’avaient pas vraiment de processus pour traiter ces demandes et demandaient souvent des informations personnelles comme une adresse postale (information que nous ne souhaitions pas voir apparaitre dans les échanges rendus publics et qui ne sont pas nécessaires en vertu de la loi). Par ailleurs, certains responsables de l’accès aux document des organismes participant voyaient d’un mauvais oeil le fait que l’ensemble des échanges soient publics.

Une fois ces difficultés résolues, le portail a permis de faire transiter 31 demandes, dont 15 ont permis l’accès aux documents demandés, notamment les bilans des ressources informationnelles des ministères ainsi que l’utilisation des budgets discrétionnaires des ministres. Le nombre de demande fut inférieur aux attentes, mais la limitation à 5 ministères (alors que près de 2 000 organismes sont soumis à la loi sur l’accès aux documents) a fait que plusieurs demandeurs potentiels rencontrés pendant cette période n’ont pas pu utiliser l’outil.

Développement souhaité… mais non réalisé

Après la période de pilote, le Ministère du conseil executif (MCE) devait réaliser une évaluation de l’outil et des demandes qui en ont résulté et proposer un cheminement pour la suite. Malheureusement, à ce que l’on sache, l’évaluation n’est jamais venue. Pendant plusieurs mois, Nord Ouvert a jonglé avec l’idée d’importer dans Je Veux Savoir les 2 000 organismes listés par la Commission d’accès à l’information, quelque soit le résultat de l’évalution de MCE. Toutefois, les efforts humains et financiers nécessaires pour maintenir la plateforme sont entrés en concurrence avec d’autres projets que Nord Ouvert réalise sans revenu (Represent, le développement de Popolo et la participation à l’Open Data Working Group de l’Open Government Partnership). Devant le risque d’étirer à l’excès nos ressources et la difficulté à obtenir un financement ou un support opérationnel, nous prenons donc pris la décision d’arrêter Je Veux Savoir le 30 juin prochain.

Ce ne fut pas une décision facile à prendre (et longuement repoussée), toutefois il semblait préférable de simplement arrêter le projet plutôt que de laisser le site sans réel support ni vérification de ce qui s’y passe. Nous continuons à être convaincus que Je Veux Savoir est un outil puissant et nécessaire: malgré les promesses répétées de revoir l’accès à l’information, d’un point de vue extérieur les choses ne semblent avoir progressées en deux ans. Par ailleurs le Québec continue à se classer en queue de peloton sur le sujet tandis qu’un nombre important de citoyens ignorent leurs droits en matière d’accès à l’information ou se laissent rebuter par un processus de demande qui semble plus compliqué qu’il n’est réellement. En plus de rendre les demandes d’accès à l’information plus faciles à réaliser et à suivre, Je Veux Savoir permettait de rendre plus d’information ouverte et de documenter les refus des organismes publics. Enfin Je Veux Savoir visait implicitement à augmenter l’utilisation du numérique dans les services publics alors que l’accès à l’information demeure en retard sur ces aspects.

Les difficultés rencontrées soulignent aussi le problème récurrent des initiatives de type “civic tech”: qui doit payer. La démarche initiale, ayant permis d’obtenir un financement public et la collaboration des organismes publics visés étaient exceptionnelles comparativement aux autres initiatives du genre. Toutefois quel développement idéal aurait du avoir ce genre d’initiative? Est-ce que l’adoption de l’outil par le gouvernement sous forme d’un service officiel serait souhaitable? Ou est-ce que ce genre d’outil devrait rester dans les mains de la société civile sous forme de support philanthropique ou de subvention? Quoiqu’il en soit, nous demeurons à l’écoute de toute idée ou proposition permettant de relancer un tel service.